France – Focus élection présidentielle : la fiscalité des entreprises et des ménages
EN BREF
- Comme chaque semaine, et ce jusqu’au premier tour de l’élection présidentielle française, nous revenons sur une thématique centrale de la campagne électorale. Cette semaine, nous abordons les propositions relatives à « la fiscalité des ménages et des entreprises » des cinq principaux candidats.
- Le point de départ de cette publication est de revenir brièvement sur les principales sources de recettes publiques de l’Etat et de positionner la fiscalité française au regard de ces partenaires européens. Il ressort de ce premier constat que la France a un niveau de prélèvement relativement élevé qui se caractérise par une fiscalité sur le travail et le capital au-dessus de la moyenne des pays membres de la zone euro. En tendance, la pression fiscale n’a eu cesse de croître sur la dernière décennie et ce mouvement s’est accéléré depuis 2010.
- L’analyse des programmes met en évidence le fait que la quasi-totalité des candidats se prononce plutôt dans le sens d'un allègement de la fiscalité sur les cinq prochaines années. A l’exception de J-L. Mélenchon, aucun candidat ne milite pour une remise à plat radicale du système fiscal. Les quatre autres candidats proposent plutôt des ajustements paramétriques de la fiscalité des ménages et des entreprises. Dans l’ensemble, la plupart des candidats se prononce en faveur d’un renforcement des mesures de lutte contre l’évasion et l’optimisation fiscale.
Une brève revue de la fiscalité en France
Selon les données d’Eurostat, issues de son rapport annuel sur les tendances de la fiscalité en Europe, le principal poste de recette fiscale (hors cotisations sociales) en France demeure l’impôt sur le revenu, qui a rapporté 188Mds€ en 2014 (voir graphique-dessous), suivi par les recettes de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) qui représentaient environ 150Mds€ sur une année pleine. Les impôts sur la production ou sur les produits (tabac, boissons, produits énergétiques, etc.) totalisaient respectivement 99Mds€ et 90Mds€ en 2014. Enfin, les cotisations sociales effectives atteignaient 365Mds€ avec une part à la charge des employeurs à hauteur de deux-tiers du total.

Par rapport à ces partenaires européens, le système fiscal français présente quelques spécificités que nous présentons brièvement. D’une part, l’ensemble des prélèvements fiscaux et sociaux ont représenté 46% du PIB en 2014 (980Mds€). Depuis 2002, le taux de prélèvement a progressé d’environ 4 points de PIB et affiche désormais le niveau le plus élevé des pays membres de l’OCDE, à l’exception du Danemark. D’autre part, les prélèvements sociaux et fiscaux sur le travail se situent bien au-dessus de la moyenne des pays de la zone euro (voir graphique ci-contre) et reposent principalement sur les contributions des employeurs. La fiscalité du capital se distingue également par un niveau de prélèvement supérieur (10,5% du PIB) à celui de nos partenaires.
Bien que ce raisonnement comparatif présente des limites évidentes, dans le sens où il fait l’impasse sur l’aspect historique de l’évolution de la fiscalité et sur les spécificités propres à chaque pays, comme, par exemple, le choix de financer la protection sociale (assurance maladie, retraite) par une contribution mutualisée à travers un système public, il apporte un premier éclairage avant une mise en perspective des propositions des candidats à l’élection présidentielle.

Ce que proposent les candidats
Dans son projet, F. Fillon prévoit de revenir sur une partie des mesures fiscales du quinquennat précédent. Sur l’impôt sur le revenu, le candidat du parti «les Républicains » souhaite revenir sur l’abaissement du plafond du quotient familial instauré dès 2012 (c'est-à-dire la modulation de l’imposition sur le revenu en fonction du nombre d'enfants d'un ménage) et propose de le relever à 3000 euros, un niveau supérieur à ce qu’il était en 2012 (2300 euros). De plus, son programme prévoit un retour à l’universalité des allocations familiales. F. Fillon ne souhaite également pas appliquer le prélèvement de l’impôt à la source, mesure qui devait entrer en vigueur en 2018. Par contre, le barème progressif de l’impôt sur le revenu tel qu’il existe aujourd’hui avec cinq tranches d’imposition serait maintenu. L’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), qui a rapporté 5,2Mds€ en 2014, devrait être supprimé dès 2018 mais recouvré sur l’année 2017. Il prévoit une révision de la fiscalité du capital, qui concerne à la fois les placements à revenus fixes, les dividendes et l’assurance-vie, en proposant une suppression du barème progressif en faveur d’un prélèvement forfaitaire de 30% (prélèvements sociaux inclus). La fiscalité sur les plus-values immobilières restera inchangée (prélèvement forfaitaire de 19% et prélèvements sociaux de 15,5%) mais le seuil de conservation sera ramené à 15 ans sur les plus-values qui ne concernent pas la résidence principale. Par ailleurs, une mesure de déduction fiscale des investissements dans les petites et moyennes entreprises (PME) devrait être mise en place pour l’impôt sur le revenu (une exonération fiscale de ce type était déjà en vigueur pour l’ISF). Enfin, la proposition de suppression des cotisations sociales « maladie » devrait permettre un allègement de la fiscalité sur le travail et sera financée par une augmentation de deux points du taux de TVA, ce dernier passant de 20% à 22% pour le taux standard. Un taux réduit de TVA devrait être créé pour l’achat de la résidence principale.
B. Hamon inscrit son projet de fiscalité des ménages autour de trois éléments clés. D’une part, il prévoit une hausse du nombre de tranches de l’impôt sur le revenu afin de le rendre plus progressif, sans que le barème n’ait été encore précisé, et souhaite mener à bien la réforme du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu, entamée par l’administration sortante. D’autre part, il souhaite revoir la fiscalité sur le patrimoine en fusionnant l’ISF et la taxe foncière. Ainsi, il veut créer un impôt unique sur le patrimoine qui sera calculé en tenant compte des emprunts contractés (impôt net des dettes). Enfin, concernant la fiscalité des entreprises, B. Hamon prévoit de moduler l’imposition des sociétés en fonction de la part des bénéfices réinvestis, de renforcer la lutte contre les schémas d’optimisation fiscale (taxe sur les bénéfices des multinationales, sanctions commerciales contre les paradis fiscaux, harmonisation de l’assiette et du taux de l’impôt sur les sociétés en Europe) et de créer une fiscalité nouvelle sur les robots et les machines en appliquant les prélèvements de cotisations sociales, non plus uniquement sur le travail, mais sur l’ensemble de la valeur ajoutée. Enfin une dernière mesure mise en avant par B. Hamon vise à réduire la TVA sur les produits bio.
La proposition phare de M. Le Pen sur la fiscalité des ménages concerne avant tout une réduction de 10%, pour les trois premières tranches du barème, de l’impôt sur le revenu (c'est-à-dire les tranches de 14%, 30% et 41% pour des revenus annuels compris entre 9 710 et 152 260 euros). Tout comme F. Fillon, elle prévoit d’augmenter le plafond du quotient familial, en ajoutant à cela le rétablissement de la demi-part fiscale pour les veufs et veuves. M. Le Pen propose également de défiscaliser les heures supplémentaires et prévoit d’alléger le dispositif de donations en permettant aux parents de transmettre 100 000 euros à chaque enfant tous les cinq ans en étant exonéré de taxation. Par ailleurs, l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) sera maintenu sous sa forme actuelle et le prélèvement à source de l’impôt sur le revenu ne sera pas mis en œuvre. Du côté des entreprises, elle prévoit une réduction du taux d’imposition des sociétés pour les petites et moyennes entreprises (PME) qui passera de 33 à 24% et un abaissement des charges sociales pour les TPE-PME conditionné au maintien de l’emploi. Enfin, M. Le Pen souhaite mettre en place une contribution sociale de 3% sur les importations pour financer une prime de pouvoir d’achat.
De son côté, le programme d’E. Macron ne propose pas de modification du barème d’impôt sur le revenu mais offrira la possibilité aux ménages d’opter pour l’individualisation de l’impôt. Il est favorable à la mise en place du prélèvement à la source mais souhaite reporter son application à 2019 (délai supplémentaire d’un an). A destination des ménages, il prévoit de supprimer la taxe d’habitation pour environ 80% des foyers (foyer dont le revenu par part est inférieur à 20 000 euros annuels) et de réduire les cotisations sociales salariales afin de réduire la différence entre le salaire brut et le salaire net, autrement appelée coin socialo-fiscal. Son projet de fiscalité sur le capital l’amène à introduire un prélèvement forfaitaire unique de l’ordre de 30% incluant les prélèvements sociaux sur les placements à revenus fixes, intérêts et dividendes, tout en offrant la possibilité d’opter pour le choix du barème de l’impôt sur le revenu. Le projet d’E. Macron ne prévoit pas de modification de la fiscalité sur les plus-values immobilières. L’ISF devrait être supprimé (mais recouvré en 2017) et remplacé par un impôt sur la fortune immobilière soumis aux mêmes conditions de barème et de seuil que l’ISF actuel. Du côté de la fiscalité des entreprises, E. Macron veut réduire le taux d’imposition sur les sociétés de 33% à 25%. Cette mesure sera accompagnée d’une transformation du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) en allègement de charge sociale.
J-L. Mélenchon est le seul des cinq candidats à ne pas promettre une diminution de la pression fiscale à la fin de son quinquennat (49% du PIB en 2022). En premier lieu, il compte rapprocher l’impôt sur le revenu et la contribution sociale généralisée (CSG), en rendant cette dernière progressive contre un taux unique de 7% aujourd’hui. Le candidat du « Front de Gauche » propose de modifier en profondeur le barème de l’impôt sur le revenu + CSG en passant de 5 à 14 tranches d’imposition, de relever le taux marginal de la tranche supérieure de 45% à 90% et souhaite également transformer le quotient familial actuel en crédit d’impôt forfaitaire (1000 euros par enfant) tout en laissant le choix du régime d’imposition (individuel ou commun pour les couples). Son projet inclut également une remise à plat des régimes fiscaux dérogatoires s’ils sont jugés « inefficaces socialement ou nuisibles écologiquement ». Son projet prévoit de réduire la TVA sur les produits de première nécessité. Concernant l’ISF, il entend durcir le dispositif existant à travers une assiette élargie, notamment aux œuvres d’art. Par ailleurs, il veut aligner le taux d’imposition des revenus du capital à celui du travail. Du côté de la fiscalité des entreprises, J-L. Mélenchon compte abaisser le taux de l’impôt sur les sociétés de 33 à 25% mais augmenter de 5 à 8% la taxe sur les bénéfices non réinvestis des entreprises cotées et supprimer les allègements de charges du pacte de responsabilité et du CICE.
Télécharger - France – Focus élection présidentielle : la fiscalité des entreprises et des ménages (pdf - 296.42 Ko)
Rédigé par
Thomas Foicik,
le 05 avril 2017
Ce document est établi par Covéa Finance, société de gestion de portefeuille agréée par l’Autorité des Marchés Financiers sous le numéro 97-007, constituée sous forme de société par actions simplifiée au capital de 7 114 644 euros, immatriculée au RCS Paris sous le numéro B 407 625 607, ayant son siège social au 8-12 rue Boissy d’Anglas 75008 Paris. Ce document est produit à titre indicatif et ne peut être considéré comme une offre de vente ou un conseil en investissement. Il ne constitue pas la base d’un engagement de quelque nature que ce soit, ni une évaluation de stratégie ni aucune recommandation d’investissement dans des instruments financiers. Il contient des opinions et analyses générales et non personnalisées conçues par Covéa Finance à partir de données chiffrées qu’elle considère comme fiables au jour de leur établissement en fonction du contexte économique, mais dont l’exactitude et la validité ne sont toutefois pas garanties. Les opinions exprimées dans le document peuvent faire l’objet de modifications sans notification. Covéa Finance ne saurait être tenue responsable de toute décision prise sur la base d’une information contenue dans ce document. Ce document est la propriété intellectuelle de Covéa Finance. Toute Utilisation (définie ci-après), reproduction ou diffusion de tout ou partie du présent document devra faire l’objet d’une autorisation préalable de Covéa Finance. Le destinataire du présent document a connaissance et accepte que les données chiffrées, permettant d’établir les opinions et analyses générales et non personnalisées, peuvent être soumises à l’acquisition de droits vis-à-vis de tiers. Par conséquent, les données chiffrées ne peuvent en aucun cas faire l’objet d’une quelconque Utilisation par le destinataire du document sans l’acquisition préalable des droits nécessaires directement auprès des tiers détenteurs de ces droits. Par ailleurs, le destinataire du présent document a connaissance et accepte que Covéa Finance ne sera en rien responsable de toute utilisation faite desdites données chiffrées et assumera seul toutes les conséquences vis-à-vis des tiers détenteurs des droits associés à ces données. L’ « Utilisation » s’entend comme, et de manière non limitative, la manipulation de la donnée chiffrée, la distribution, la redistribution, l’intégration dans un système d’information ou dans des documents de tous types.