Environnement économique - juin 2025

Environnement économique

Temps de lecture : 13 min

L’incertitude nourrit la prudence des banques centrales

Nos perspectives économiques et financières

Aux Etats-Unis, la nouvelle administration s’inscrit dans la continuité des précédentes, avec la volonté de défendre et asseoir les avantages compétitifs du pays et à en réduire les vulnérabilités dans un monde où son leadership est désormais contesté par la Chine. Cette politique américaine privilégie des approches bilatérales confirmant la volonté de réorganiser les échanges mondiaux sur une base plus régionale. Un mode de fonctionnement qui se généralise dans le cadre d’un multi régionalisme plus affirmé. En Europe, l’Allemagne a annoncé des réformes budgétaires historiques et un plan d’investissement important pour répondre aux défis structurels auxquels son économie est confrontée. L’ampleur des effets des plans allemand et européen sur l’activité de l’UE fait face aux défis de leur mise en place et à la compétition d’accès aux financements, enjeu de rivalité majeur à l’intérieur de la zone. Ce contexte alimente les facteurs structurels inflationnistes que nous décrivons. Cependant, nous restons vigilants sur les effets des droits de douane américains sur la dynamique de l’activité mondiale et ses effets sur l’inflation.

A l’approche de l’expiration du délai accordé par Donald Trump pour négocier les relations commerciales avec les partenaires commerciaux des Etats-Unis, peu d’avancées sont à noter. La Chine et les Etats-Unis ont, certes, trouvé un accord pour relancer leurs négociations, en diminuant leurs restrictions respectives sur certaines exportations. Mais, les discussions semblent rester difficiles avec ses autres grands partenaires commerciaux. Au Moyen-Orient, la brève guerre entre Israël et l’Iran, terminée après des bombardements américains sur des installations de la République islamiste, a engendré un regain de volatilité sur les cours du pétrole. Sur le marché des changes, l’euro s’est apprécié de 3,36% sur le mois contre le dollar, à 1,1720. Le prix du baril de Brent a augmenté de 5,8% par rapport au mois précédent, à 67,61$.

ameriqueAux Etats-Unis, la Réserve fédérale a laissé une nouvelle fois son objectif de taux des fed funds inchangé dans une fourchette de 4,25% à 4,50% au mois de juin, malgré une pression croissante de Donald Trump pour une forte détente de la politique monétaire. La banque centrale a relevé ses prévisions de taux de chômage et d’inflation, tout en maintenant un discours centré sur l’incertitude générée par la politique commerciale des Etats-Unis. Deux membres du comité de politique monétaire se sont toutefois prononcés ouverts à une baisse des taux directeurs dès leur réunion de juillet. La persistance de l’incertitude pèse sur les perspectives d’activité, mais la hausse déjà mise en œuvre des droits de douane nourrit aussi les tensions inflationnistes, de nombreuses entreprises américaines exprimant leur intention de répercuter les hausses de coûts qui en résultent dans leurs prix de vente. Les Etats-Unis et la Chine ont conclu un accord pour relancer leurs négociations commerciales, les deux partis assouplissant notamment des restrictions à l’exportation de biens critiques. Le dialogue avec les autres partenaires commerciaux semble plus difficile alors que l’échéance du 9 juillet approche à grands pas. Par ailleurs, l’administration Trump a annoncé le retrait du projet de surtaxation des revenus d’investissement des non-résidents après que les Etats-Unis ont obtenu de leurs partenaires du G7 que les sociétés américaines soient exemptées de l’impôt minimal mondial de 15% élaboré sous l’égide de l’OCDE. 

EuropeAu Royaume-Uni, la Banque d’Angleterre (BoE) a laissé son taux directeur inchangé en juin, à 4,25%. Malgré un conseil de politique monétaire divisé, la banque centrale défend toujours la nécessité d’une approche « graduelle et prudente », tout en notant que le manque de vigueur de l’activité pèse sur le dynamisme du marché du travail. Toutefois, bien qu’en ralentissement, les salaires restent en forte hausse et l’inflation est encore très au-dessus de l’objectif de la BoE, à 3,4% en mai. Sur le plan budgétaire, la ministre des Finances a annoncé que l’augmentation désirée des dépenses de défense sera financée par des arbitrages au détriment des ministères de l’Intérieur et des Affaires étrangères. Ces arbitrages profiteront aussi au secteur de la santé.

En zone euro, la banque centrale a baissé se taux directeurs de 25 points de base en juin, leur 8e recul consécutif, ramenant le taux d'intérêt de la facilité de dépôt à 2,00%. Le discours plaide pour une pause à ce niveau. S’ils attendent un recul supplémentaire de l’inflation (1,9% en mai) l’année prochaine, les banquiers centraux estiment qu’elle remonterait ensuite pour revenir sur leur objectif. L’activité économique reste peu dynamique, notamment en France et en Allemagne, mais les indicateurs ne se dégradent plus. A l’approche de l’expiration du délai accordé par Donald Trump pour les négociations bilatérales avec les partenaires commerciaux des Etats-Unis, les membres de l’Union européenne (UE) peinent à adopter une position commune : certains poussent à accepter (moyennant quelques aménagements) les droits supplémentaires de 10% quand d’autres plaident pour la mise en œuvre des mesures de rétorsion dont dispose l’UE. Par ailleurs, la Commission s’apprête à engager un dialogue avec le Partenariat transpacifique global et progressiste (PTGP) afin d’avancer dans la création d’une nouvelle alliance chargée de promouvoir des échanges commerciaux fondés sur des règles claires et prévisibles. 

AsieEn Chine, l’activité économique résiste aux perturbations commerciales. La hausse des exportations vers d’autres zones (et notamment vers l’UE) compense partiellement la forte baisse des livraisons de marchandises aux Etats-Unis et, à l’exception de la baisse continue de l’investissement immobilier, la demande domestique reste en croissance. Dans ce contexte, la Banque populaire de Chine a renouvelé son biais à la détente de sa politique, tout en soulignant des signes d’amélioration de la conjoncture économique. La banque centrale se montre aussi moins encline à défendre le taux de change du yuan. Au Japon, après la contraction du PIB au premier trimestre, les statistiques économiques restent mitigées. Cela justifie le maintien d’une grande prudence de la Banque du Japon, en dépit d’une inflation (3,5% en mai) toujours très supérieure à son objectif. Les négociations commerciales avec les Etats-Unis n’ont pas encore permis d’aboutir à un accord.

Rédigé par :

Jean-Louis MOURIER

Chargé d'Etudes Macro-Economiques

1er juillet 2025