Environnement économique - octobre 2024
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Un différentiel de croissance qui perdure entre les Etats-Unis et la zone euro
Nos perspectives économiques et financières
Dans un monde où les tensions géopolitiques s’intensifient, les Etats-Unis, la Chine et l’Union européenne tentent de renforcer leur souveraineté par le biais de politiques industrielles et commerciales, de dispositifs de contrôle, de règlementations ou encore de facilités d’accès au financement. Ces stratégies nourrissent l’accroissement important de l’endettement des Etats, alimentent les déséquilibres inflationnistes et modifient les flux du commerce international. Elles se traduisent par des différences de performances notables entre économies et exigent une adaptation des modèles des entreprises. En l’absence d’un organe multilatéral de conciliation opérant, ces distorsions de concurrence provoquent des mesures de rétorsions compensatoires. Un schéma d’escalade qui pourrait accélérer le Multi-régionalisme. Les Banques Centrales ont des marges de manœuvre contraintes, la matérialisation d’un risque financier ou politique pourrait les forcer à intervenir.
La croissance économique au troisième trimestre s’est montrée bien plus dynamique aux Etats-Unis qu’en zone euro : alors que la consommation des ménages américains continue de soutenir l’activité, la conjoncture européenne demeure freinée par la faiblesse de l’Allemagne. L’inflation poursuit son recul dans les grandes zones, mais les risques de maintien de pressions haussières sur les prix ne peuvent pas être écartés. Le marché du travail reste en effet tendu en zone euro, tandis que les mouvements de grève se sont accentués aux Etats-Unis. En Chine, la dégradation du secteur immobilier continue de pénaliser l’économie mais les données d’activité de septembre ont été encourageantes. Au Japon, le parti au pouvoir a perdu la majorité absolue à la chambre basse du parlement pour la première fois depuis 2009. Sur le marché des changes, l’euro s’est déprécié de 2,80% sur le mois contre le dollar à 1,0882. Le prix du baril de Brent est en hausse de 1,94% par rapport au mois précédent, à 73,16$.
Aux Etats-Unis, la croissance du Produit Intérieur Brut (PIB) au troisième trimestre confirme la résistance de l’économie. Le PIB américain est en effet en hausse de 0,7% en glissement trimestriel, un rythme similaire à celui affiché au deuxième trimestre. Alors que des craintes sur la dynamique de dépenses des ménages ont émergé au cours du trimestre, notamment au regard du refroidissement du marché du travail, la consommation a finalement accéléré tandis que l’investissement des entreprises est resté solide. Néanmoins, les indicateurs publiés sur le mois témoignent d’une dégradation toujours marquée de l’activité manufacturière, en partie pénalisée par la grève chez Boeing. Cette dernière illustre d’ailleurs les risques de boucle prix-salaire qui continue de peser sur les perspectives d’inflation. La croissance des prix poursuit sa modération, mais à un rythme plus lent.
Au Royaume-Uni, le gouvernement travailliste a dévoilé son premier budget depuis les élections. Celui-ci prévoit une hausse des dépenses, financée par une augmentation des impôts et des emprunts. Alors que l’inflation poursuit sa baisse et atteint 1,7% en septembre, l’Office for Budget Responsability estime que la hausse des dépenses pourrait avoir un effet haussier sur l’inflation. Concernant l’activité, les données publiées sur le mois montrent un ralentissement modéré de la croissance.
En zone euro, la Banque centrale européenne a de nouveau baissé ses taux directeurs lors de la réunion d’octobre. Cette baisse de 25 points de base (la troisième depuis le mois de juin), s’inscrit dans un contexte de recul plus marqué de l’inflation européenne, malgré un léger rebond en octobre à 2,0% (après 1,7% en septembre). Les récents discours des banquiers centraux européens illustrent néanmoins un consensus qui tend à faiblir concernant la vitesse et l’ampleur de l’assouplissement monétaire. Le PIB de la zone euro a progressé de 0,4% au troisième trimestre (par rapport au trimestre précédent), mais les indicateurs d’enquête continuent de souligner la faiblesse de la conjoncture, notamment en Allemagne. En dépit des signes de stagnation de l’activité, le marché du travail reste tendu dans la zone euro. Sur le plan commercial, les Etats-Membres de l’Union européenne ont adopté de nouveaux droits de douane sur les véhicules électriques chinois. Ce vote a néanmoins mis en lumière les divisions au sein de l’UE : alors que la France, l’Italie et huit autres pays se sont montrés en faveur de cette mesure, l’Allemagne, la Hongrie, la Slovaquie, la Slovénie et Malte s’y sont opposés. Douze pays (dont l’Espagne) se sont abstenus.
En Chine, l’économie reste freinée par le secteur immobilier. La croissance du PIB a accéléré au troisième trimestre à 0,9% (en glissement trimestriel), après 0,5% au deuxième trimestre, soutenue par la hausse de l’activité industrielle, de la consommation et de l’investissement en septembre. En revanche, ces signes de redressement ne sont pas généralisés au secteur immobilier, dont les données restent mal orientées. Les autorités chinoises devraient préciser, début novembre, les contours du plan de relance budgétaire annoncé en septembre.
Au Japon, le parti au pouvoir perd la majorité absolue à la chambre basse du Parlement. Le parti Libéral Démocrate (PLD) du nouveau Premier ministre Ishiba n’a pas réussi à obtenir les 233 sièges nécessaires pour disposer d’une majorité absolue lors des élections parlementaires et devra élargir la coalition gouvernementale avec des partis d’opposition pour gouverner. Par ailleurs, l’enquête PMI rapporte une contraction de l’activité en octobre, tant dans les services que dans le secteur manufacturier.
Sources des données : Datastream, Bloomberg, US Bureau of Labor Statistics, US Bureau of Economic Analysis, Office for National Statistics, Eurostat, BCE, S&P Global, Statistics Bureau of Japan, Japan Cabinet Office, National Bureau of Statistics of China.
Eloïse GIRARD-DESBOIS,
Économiste
le 4 novembre 2024