"Le regard du gérant" - Réforme du système de retraite aux Pays-Bas : quels impacts sur les taux souverains européens ?

Le Point de vue de l'expert

Temps de lecture : min

Le système de retraite aux Pays-Bas (tout comme en Suisse) se démarque par rapport aux autres pays européens. Constitué en paliers, il comprend un premier niveau, le régime public de base par répartition, et un second niveau, les régimes professionnels par capitalisation

Le premier pilier attribue à chaque individu de plus de 65 ans, retraité ou non, une pension forfaitaire minimale sans conditions de ressources. Financé par la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu, cette prestation correspond à un pourcentage du salaire minimum net déterminé selon le nombre de retraités au sein du foyer fiscal. Ce régime de base est complété par des régimes de retraite par capitalisation, gérés par les fonds de pension. 

Jusqu’à présent, ce dernier pilier fonctionnait sur la base d’un régime à prestations définies. L’objectif était un taux de remplacement du dernier salaire de l’ordre de 70%, pension du premier pilier compris. Pour assurer ce revenu, les fonds de pensions étaient obligés d’être fortement présents sur la partie longue de la courbe de taux puisqu’il existe une relation inverse entre l’âge de l’individu et la durée d’investissement. Leurs portefeuilles se composaient donc essentiellement d’obligations souveraines de long terme afin d’aligner les investissements avec les engagements. 

Avec l’évolution démographique et une mobilité professionnelle plus importante qu’avant, les Pays-Bas ont procédé à une réforme de leur système de retraite. À compter du 1er janvier 2026, le second pilier passera d’un système à prestations définies à un modèle à contributions définies pour l’ensemble de l’encours. Autrement dit, l’objectif d’investissement pour ce pilier évolue d’un profil d’assurance d’un revenu à un profil où la prise de risque évolue en sens inverse de l'âge des individus. Cette bascule devra être réalisée sur un lapse de temps très court, avant le 1er janvier 2028. 

Dès lors, les conséquences en termes d’allocation sont nombreuses. Les pondérations actions et sur le non coté (dette privée, capital investissement, infrastructure, immobilier) seront plus importantes chez les jeunes salariés. 

Pour la partie obligataire, d’après certaines estimations, entre 100 et 130 Mds€ d’obligations souveraines à long terme (à 30, 40 et 50 ans) devront être vendues dans le cadre de la réallocation. Seraient notamment concernées les dettes souveraines néerlandaises et allemandes, qui représentent respectivement 20% et 10% des encours des fonds de pensions néerlandais. Par comparaison, le programme d’émissions de l’Allemagne pour l’exercice 2025 était estimé autour de 250 Mds€ d’emprunts. Ce segment de courbe de taux perd donc un groupe d’investisseurs réguliers alors que l’offre devrait rester soutenue. Ainsi, comme nous le décrivons dans nos Perspectives Economiques et Financières, une demande plus faible des investisseurs traditionnels couplée à une offre toujours abondante constituent encore des facteurs haussiers sur les parties longues de la courbe.

Rédigé par

Nicolas VIENNE
Gérant OPC Taux