Flash marchés - Les marchés suspendus à une décision majeure de la Fed sur le calcul du Ratio de Levier Supplémentaire (SLR)

Le Point de vue de l'expert

D’ici le 31 mars, la Fed doit se prononcer pour prolonger, ou non, l’exclusion des bons du Trésor et des dépôts des banques à la Banque centrale de leur calcul du ratio de levier.

En clair, cette exemption donnait aux banques il y a un an, leur permet de détenir ces actifs sans consommation de fonds propres. Cette mesure a été mise en place en pleine pandémie pour permettre aux banques de faire face aux demandes de financement de l’économie (notamment permettre de respecter leurs engagements auprès des entreprises qui ont tiré massivement sur leurs lignes de crédit) sans être contraintes par leurs fonds propres. La mesure a été pleinement efficace puisque les bilans bancaires ont pu continuer de croître massivement, et ainsi permettre d’amener de la liquidité dans l’économie, sans mettre de pression sur le financement de l’Etat.

Un an plus tard, la question d’un renouvellement ou non de cette disposition se pose.
Plusieurs voix s’élèvent pour la suspendre et remettre de la discipline dans les bilans bancaires, une discipline acquise de haute lutte après la crise de 2008, notamment à travers la réforme Dodd - Frank. Parmi les plus fervents opposants à sa reconduction, Sherrod Brown (président de la Commission bancaire au Sénat) a même clairement considéré que ce serait «une grave erreur» de la reconduire. La sénatrice E. Warren, fervente supportrice d’une régulation bancaire plus dure met également la pression sur la Fed. Enfin, la présidente de la FDIC (Federal Deposit Insurance Corporation - autre autorité de contrôle des banques), Jelena McWilliams estime de son côté que les banques n’ont plus besoin de cette mesure.

De leur côté, les banques s’inquiètent de leur capacité à maintenir des expositions aussi larges en emprunts d’Etat si la consommation de fonds propres devient plus importante. A tout le moins, si ces actifs commencent à coûter des fonds propres … des arbitrages devront être faits. En effet, vers quels actifs les banques vont préférer se tourner dans un environnement de contrainte sur leurs fonds propres: des prêts aux ménages, des prêts aux entreprises, des emprunts d’Etats, voire même moins de prêts pour ne pas réduire leurs programmes de rachats d’actions ? Ce dernier point est d’autant plus ironique qu’en même temps que la décision sur les fonds propres, une décision est également attendue par la Fed sur le retour de capital aux actionnaires via un allégement des contraintes sur les rachats d’actions et les dividendes !

Comment donc réconcilier des intérêts aussi paradoxaux, alors que l’enjeu est majeur pour les banques, le Trésor Américain et la Fed ?

Pour la Fed : prolonger l’exemption c’est acter une décision que la nouvelle Commission bancaire au Sénat considère comme une « erreur grave ». Et dans cette configuration comment autoriser l’augmentation des programmes de rachats d’actions aux banques ?

Une décision inverse de la Fed emporte, elle, des conséquences potentiellement non négligeables pour le Trésor : comment s’assurer de la capacité du système bancaire a absorbé l’ampleur des émissions obligataires américaines, si les banques se retrouvent contraintes sur la taille de leur bilan ?

Pour les banques : comment obtenir la concession de la Fed de poursuivre l’exclusion et en même temps obtenir gain de cause sur plus de retour aux actionnaires ?

La décision ne devrait pas intervenir avant le prochain FOMC (Federal Open Market Committee), puisqu’il y a fort à parier que J. Powell ne souhaite pas mettre ce débat et ses conséquences pleinement sur la place publique.

Rédigé par

Vincent HADERER
Responsable du pôle Gestion Amérique et Monde

Le 12 mars 2021 

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